Pronote et École Directe : mises à jour suspendues le soir et le week‑end
- Kimi
- il y a 3 jours
- 4 min de lecture

Résumé en une phrase
Depuis la rentrée 2025 (1ᵉʳ septembre), le ministère de l’Éducation nationale applique un “droit à la déconnexion” qui gèle les mises à jour des ENT — dont Pronote et École Directe — de 20 h à 7 h ainsi que le week‑end, une mesure annoncée par Élisabeth Borne le 13 mai 2025 et formalisée par une circulaire publiée le 10 juillet 2025.
1) Ce qui change (et ce qui ne change pas)
Les créneaux “off” par défaut. La diffusion d’informations (notes, devoirs, messages…) est suspendue dans les ENT de 20 h à 7 h en semaine, et du vendredi 20 h au lundi 7 h. Ce point figure noir sur blanc dans la documentation du ministère.
Un gel, pas forcément une coupure totale. La circulaire du 10 juillet 2025 parle de “suspension des mises à jour” : selon l’éditeur et les réglages locaux, l’accès peut rester possible mais sans nouvelles publications ni notifications. Certains médias ont titré sur des ENT “fermés” ou “déconnectés”, d’où une confusion sur le terrain.
Des marges d’adaptation. Le ministère indique que les chefs d’établissement peuvent adapter ces plages si nécessaire (projets, internats, examens…).
2) La chronologie et la base officielle
Annonce politique. Le 13 mai 2025, en déplacement à Bondy, Élisabeth Borne annonce vouloir “arrêter les mises à jour” des ENT et de Pronote la nuit et le week‑end, dans l’esprit du “droit à la déconnexion”.
Texte d’application. La circulaire “Promouvoir un numérique raisonné à l’École” est publiée au Bulletin officiel le 10 juillet 2025 et inscrit la mesure parmi quatre volets (dont “Portable en pause”).
Mise en œuvre. Entrée en vigueur le 1ᵉʳ septembre 2025 pour la rentrée : enseignants et familles découvrent les nouvelles règles (et leurs effets) dès la première semaine.
Qui est la ministre ? Pour éviter tout contresens : Élisabeth Borne est bien ministre d’État, ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche depuis décembre 2024.
3) Pourquoi tant de monde juge la décision “stupide” ? Cinq angles morts pointés
a) Une mesure brutale dans ses effets quotidiens. Des enseignants et parents dénoncent une décision “extrême”, “abrupte”, “infantilisante”, perçue comme une gouvernance des usages au lieu d’un travail pédagogique concerté.
b) Confusion “fermé vs gelé”. Quand la presse annonce “ENT coupés”, beaucoup comprennent blocage d’accès, alors que le ministère vise un gel des mises à jour. Cette confusion complique l’organisation des devoirs de longue durée, des corrections planifiées ou des échanges nécessaires sur des projets.
c) Risque d’**effet de déport. Interdire les mises à jour scolaires hors‑temps peut pousser certains à contourner via des messageries privées non encadrées (WhatsApp, réseaux), affaiblissant la traçabilité et la protection des échanges scolaires — un risque régulièrement signalé quand on “bouche” un canal sans alternative claire (inférence à partir des objectifs de la mesure).
d) Inégalités d’organisation. Les soirs et week‑ends sont parfois les seuls moments où certaines familles peuvent se synchroniser (garde alternée, horaires atypiques, internats). L’adaptation locale est prévue, mais mal connue et inégalement appliquée.
e) Un symptôme plutôt qu’un remède. La pression ressentie par les familles (notifications, notes, devoirs) vient aussi de pratiques et de cadres d’évaluation. Geler les ENT ne remplace pas une charte des devoirs non numériques, une sobriété d’évaluation ou une formation à l’hygiène numérique. Le rapport “Enfants et écrans” (avril 2024) motivait déjà ce besoin d’un cadre cohérent.
4) Les raisons (sérieuses) du ministère
Le gouvernement met en avant la santé et le bien‑être des élèves : limiter la pression des notifications et réduire l’hyperconnexion le soir et le week‑end. Le rapport “Enfants et écrans” recommande justement de fixer un cadre strict pour les ENT/Pronote (coupure des mises à jour/notifications le soir). La circulaire de juillet précise que la mesure s’inscrit dans un ensemble : formation à un usage raisonné, “Portable en pause”, accompagnement des familles, pas juste une coupure technique.
5) Qui décide… et qui exécute ?
Les ENT sont des services numériques à l’échelle des territoires, pilotés en lien avec les collectivités (départements pour les collèges, régions pour les lycées) et l’État via le cadre national. La ministre elle‑même a rappelé que la mise en œuvre se ferait “en lien avec les collectivités territoriales qui gèrent ces ENT”. Côté éditeurs, Pronote (Docaposte) et École Directe (Aplim) ont communiqué sur des réglages conformes au droit à la déconnexion.
6) Comment rendre la mesure… intelligente plutôt que “stupide” ?
Préciser localement les exceptions (internats, sections sport/arts, projets collectifs), via le cadre d’adaptation par le chef d’établissement.
Programmer/planifier les publications (devoirs, notes) en amont pour qu’elles arrivent aux bonnes heures sans couper l’information. (Recommandation opérationnelle, à articuler avec les options fournies par les éditeurs.)
Charte des devoirs “bas‑écran” : exiger que, sauf nécessité pédagogique, les devoirs n’imposent pas d’écran en soirée/week‑end — une demande déjà portée par des acteurs et relayée dans le débat public.
Limiter les notifications au strict nécessaire (paramétrage par profils), au lieu d’un flux permanent. (Aplim/École Directe met en avant ce réglage).
Former familles et équipes à l’hygiène numérique (temps d’écran, sommeil, priorisation), conformément à la stratégie de “numérique raisonné” du ministère.
Suivre et publier des indicateurs (charge perçue, contournements, délais de correction) pour corriger la mesure si elle produit des effets indésirables (déport vers des canaux privés, perte d’information, etc.). (Inférence de bonne pratique de politique publique.)
7) Verdict nuancé
Qualifier la décision de “stupide” traduit une exaspération face à une réponse jugée trop technique à un problème surtout pédagogique et social. Sur le fond, l’objectif (réduire la pression numérique) est défendable et s’appuie sur des recommandations d’experts ; sur la forme, le flou entre “gel” et “fermeture”, l’absence d’accompagnement homogène et l’annonce tardive ont nourri l’incompréhension. Bien expliquée, co‑construite et souple, la mesure peut apaiser sans pénaliser — mais mal implémentée, elle déplace les problèmes au lieu de les résoudre.